Juste un petit mot
La salutation
Ce texte s’adresse à tous les pratiquants du Kyudojo et Dojo du laurier, quelque soit la discipline.
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Voici, mes chers amis pratiquants, en cette fin d’année, quelques lignes à considérer. Par deux fois de suite, j’ai manqué ces derniers samedis l’entrée de la séance et je vous remercie d’avoir assurer son début qui est à mes yeux une clé importante pour une bonne pratique.
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De ces mots, je viens partager avec vous, afin que nous en tirions quelques réflexions et établir des changements fructueux dans nos actes présents et à venir.
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Notre pratique du Kyudo a vu de nombreux pratiquants depuis 45 ans que l’arc m’accompagne sur les bords de Garonne et cela suite à mes quelques années passées au bord du Pacifique.
Studieux et présent, inlassablement je plonge dans le cœur de l’arc autant que dans celui des pratiquants. Je réalise combien ce chemin est encore long et que mes modestes « avancées » ne sont vraiment pas grand-chose sinon une entrave à l’essentiel.
Pourtant, Je souhaite être avec vous encore longtemps, bien que l’ âge se déroule comme un défi inexorable. Je cherche désormais comment un corps affaibli peut se transcender en une énergie merveilleuse. Alors, je viens par ces quelques lignes prendre quelques peu les devants, au cas où un ou une pratiquante s’affirme clairement à marcher à mes côtés encore et encore pour prolonger cette voie et en améliorer la diffusion.
Ainsi, je souhaite préciser quelques points incontournables qui brûleront dans celle ou celui qui pourrait guider l ‘étude ponctuellement, à l’occasion pour l’instant mais de plus en plus, jusqu’à diriger la séance complète.
Cela commence particulièrement dans le salut, du début ou la fin de séance.
Fort important, cet instant demeure un des plus hauts et beaux niveaux de la pratique de l’arc. C’est un rite, un protocole, une cérémonie. Il est formel et demeure un espace extrêmement intense et puissant autant dans l’individuel que le collectif, cela par l’union consciente au groupe, au lieu et au maître. Il conditionne la valeur de ce qui suivra, par la loi implacable du cause à effet. Il estompe les trop envahissantes personnalités, bagages bruyants et encombrants apportés sans retenue.
Si cette intensité sincère se déploie, dans ces brefs moments, peut se révéler une force, un engagement, une aide toute particulière par cette invocation. C’est un appel, à la lignée, au groupe où l’on se sent porté et investi.
Pour que cette magie opère, il est quelques attentions indispensables à s’octroyer. Il se peut qu’une conscience toute particulière se manifeste alors, bien au de-là d’un exotisme si peu épanouissant et même sclérosé, sans respect pour le pays d’où est issue la pratique.
Nous avons tous ressenti combien le non-acte du Kaï, du Hanaré est mystérieux, perturbant, troublant, dense, parfois insupportable. Le salut peut être aussi profond sans la troublante sévérité de l’instant du lâcher, alors qu’on rejoint la connexion occulte.
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Cette prosternation nous plonge dans la douceur d’un abandon tranquille où on s'en remet à bien plus grand que soi-même.
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Là ou le guide, après avoir proposé le Mokuso, d’une voix claire et nette, se place devant le Kamiza, en absorbant le groupe avec son dos. Puis, il se relie, cœur/corps/esprit à son maitre et aux maitres de son maitre.
Il s’avance et fait son salut d’une manière très intense intérieurement. Puis se tournant vers l’ensemble, bien centré par rapport au groupe, en les saluant, il regarde en lui, celui qui se met au service des pratiquants, tout en réalisant qu’il n’en n’est point capable mais que cette situation dans laquelle il se trouve lui permettra de se transcender et ressentir une grande gratitude. Il peut éventuellement s’exprimer et même s’en excuser, voir même demander du soutien. Il regarde en lui ce qui le pousse à s’être mis dans cette situation et ne manquera pas d’y trouver d’autres émotions que celles de servir et peut être, plutôt celle de se servir. Dans ce cas, ce qui est très probable, il a fait un petit pas en découvrant quelque chose sur laquelle il peut intervenir afin de se transformer.
Il sera en échec total s’il ne s’aperçoit de rien, ou joue le rôle, persuadé qu’il est à la bonne place et que ça lui revient de toute évidence. Car dans ce cas, la relation aux autres provoquera le contraire espéré. « L’amour du sentiment entraine le contraire » alors que « l’amour de la conscience provoque la même chose. »
Le salut de fin de séance clôturera ce moment mais comme un passage propre vers la vie de tous les jours qui pourrait alors s’enrichir de ces derniers moments passés ensemble ouvrant déjà à la prochaine fois.
Bien sur cet engagement décrit est une étude qui n’en finit pas de se polisser, de nous imprégner, de façonner notre être, nos yeux, notre peau.
Et comme suggérer depuis quelques temps observer de quel invisible nous sommes faits et que se dégage-t-il de nous quand on est devant les autres. Voir en nous comme le disait le maître et être attentif au niveau conscient, subconscient et inconscient.
Je vous souhaite de bons moments avec vos proches pour ces fêtes de fin d’année et que la nouvelle qui s’approche, elle aussi inexorablement vous comble autant que ce que vous allez lui apporter.
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Yusen
Création
La grande Nature vierge est tout simplement belle, propre et de ce grain brillant toujours nouveau qui enveloppe toute chose naturelle.
Seul l’homme moderne adulte échappe à ce sortilège de magnificence pendant que l’animal, le végétal, le minéral, s’accordent. Ils s’imbriquent en partage dans les supports et les nourritures. On se mange, on se dévore et l’invisible est là, incroyablement présent. L’inobservable, l’indiscernable, le silence, sont un liant, un agglomérant. C’est une danse par union, une équité, un accouplement par les mélanges des sensualités. C’est l’intelligence dénuée de raison, imprégnant, enlaçante de ses milliers de bras d’amour. Dans chaque infime particule, chaque être, chaque différence et toutes les apparences frissonne cette imagination lumineuse. Elle apparait parfois chez les humains dans les arts. Elle s’écoule d’un regard, ou affleure de la peau dans un scintillement hardi.
Dès que l’homme s’introduit dans ce monde nature, son regard est captivé par les tournures, les phénomènes séduisants. Il loue le paysage qu’il va dérober de son objectif ou de ses mots et son plaisir agit en resquilleur et spoliateur, excluant toute larme de joie.
Aveugle devant l’indiscernable, il sépare, cloisonne et lui, son voisin et la nature. Il assassine sans le savoir cette vie, ce Partout. Son arrogance n’est que grisaille car persuadé de la justesse de sa raison et de sa vision.
Bien heureusement, l’insaisissable parfois prend forme et s’élève un surréel guérissant autant que féérique.
Le roc au cœur bleu, poudré d’un infime voile vert, répand son immobilité. Captive et avertie l’âme enfouie, nue, s’abandonne et disparait en secret. Un papillon noir au vol espiègle et hasardeux se câline délicieusement dans l’air de la grisaille automnale. C’est un dernier vol, hommage à la douceur des premiers jours d’automne. Il semble soudainement échappé de nulle part où naquit spontanément de l’air ambiant, du bleu trop enfoui, ou encore d’une poitrine exilée, peut-être d’une de mes mains ?
Ne serait-il point, une alliance, une complicité, un élan de tout cela ?
Toute remplie, ma patte pétille et sous la peau de la paume légèrement renflée, des voiles de brumes claires dansent au vent de l’être toujours trop mystérieux. Mes mains semblent se nourrir en touchant, en caressant, en aimant. Bien heureusement toutes mes activités, affairements, bouillonnements invitent à ce penchant, à cet instinct qui porte et me déborde.
La durée remplit et façonne l’espace, épisode infructueux malgré une audace pudique qui flotte et qui semble bien au-delà de cet événement.
Le papillon aux deux ailes nègres absorbe l’avenir et un champ large s’ouvre alors devant ses antennes rieuses. Ses élytres délicates autant qu’inspirées se posent dans l’air du temps et inventent une météorologie lumineuse.
Dans le noir de ces exquises voiles obscures, des étincelles invisibles crépitent, intuition mystérieuse qu’il faut écouter, accueillir et croire parce qu’elle est surhumaine si ce n’est divine.
L’échappée est belle.
La conjoncture des évènements est un songe qui foisonne d’émotions variées, tristes, allègres, tragiques, le tout voguant sur une mer audacieuse. Chaque instant goutte sa vague dans une danse instantanée, puis retourne à son immensité … avalée.
La grande lune du cœur d’automne gravît les pentes de l’orient. Son mouvement est parfait dans la poursuite vaine des traces du soleil. Celui-ci a déjà glissé dans des draps rouge sang dont les plis couleur argent, soulignent un passage éphémère.
La place est libre, brûlante et dans un ciel écaillé, l’astre du soir s’embrase et resplendit. Le papillon fait d’azur et de lumière retourne dans sa tanière tel un ours, ce soir d’automne. Là dans son sommeil, il prendra des nouvelles de l’âme bleue, instinct brillant de la nuit. En humble messager, il reviendra porter ces missives et nous éclairer de ses ailes qu’il a inventées toutes noires, pour qu’à chaque battement, se sèment des parcelles de lumière.
Tout s’agence parfaitement, tel une poésie aux rimes accomplies.
Le nouveau-né qu’il soit lune de crépuscule, soleil du matin encore voilé, jeune pouce fragile guettant son absolu dans un incontournable destin, chaque brin de la vie est une voix qui chante le merveilleux où tout s’imbrique.
Je voudrais armé de patience et d’urgence, m’enfoncer dans ces mots qui résonnent d’un écho silencieux, me couler dans cette voie de ferveur, de la faveur choisie afin de saisir cette chance si hasardeuse.
Je voudrais plus que les mots, acter telle la lune ou le soleil dans les poésies du faire, dans les vigueurs printanières autant que dans le souffle si profond du petit enfant qui dort.
Yusen
Secrets de roc
Les brumes argentées et laiteuses, dissimulent, estompent l’embrasement des mille verdures gaillardes et secrètes. Le dérobé sommeille ainsi dans ses cachettes, refuge et coulisses du théâtre de la grande mascarade. La scène est toujours savonneuse et instable.
Pourtant la fleur chaque fois nouvelle et illicite pourrait y être honorée. Les regards de la raison nient la vision.
Dans la roche chevelue, s’enroule une hydre occulte. Elle sommeille là depuis un âge démesuré dont le souvenir s’est perdu. Ignorée, son temps d’agonie s’étire dans une interminable certitude d’un dessein qui semble peu à peu s’oublier et se perdre. Pour se préserver de l’absence, la Chose s’est figée dans le gris-bleu de la pierre, s’ébrouant pourtant par les branches emmêlées, avec un léger sourire complice à la lumière.
Vie et mort s’étreignent dans un baiser confiant, attentif, aimable autant que curieux.
Le feu de fortune passe, il éclot dans un soupir s’étirant sur des milliers d’années. Le pire est dans l’oubli qui délaisse la flamme sacrée. Ainsi les dieux agonisent, faute d’être célébrés. Les grandes cathédrales adulées dans les histoires des mondanités religieuses où rois et reines fomentaient leurs alliances à la barbe du divin, gisent dans les futilités touristiques.
Les Dieux meurent sur leur terre.
Pourtant le bleu marbrier frémit à nouveau. Les soirs de grande chaleur, d’un peu d‘eau en pluie, je l’asperge dans le dialogue silencieux de ma main guidant le liquide, imprégnant l’eau. Une légère odeur suave embaume l’air, celle de la pierre chaude mouillée, effluve d’une étreinte sensuelle.
Les premiers souvenirs de ma petite enfance perlent et l’odeur de la roche mouillée ravive quelques images fugaces. Les premières dont je me souvienne. C’est une mémoire physique, une imprégnation cellulaire, organique, se dégageant malgré moi, elle jaillit de l’haleine pierre eau dans ce court instant.
Dans le petit jardin précieux, le bloc bleuâtre plonge dans une terre marron claire, très boueuse quand il pleut, une argile amoureuse et collante. J’apprends à la connaître sur mon tour de potier. Elle glisse, prend forme sous mes doigts encore malhabiles. Elle est fragile et s’épuise quand on lui en demande trop.
Pourtant mes mains souvent vantées par mon entourage, comme aimantes et guérissantes, ont encore beaucoup à découvrir dans la nuit des sensations silencieuses, dans les perceptions des vents à venir. Une main, tout un univers, par sa paume moelleuse, affectueuse, mais aussi son dos souple épais qui pourrait se dilater, s’épaissir quand on s’approche de quelqu’un à toucher. Oh ce dos de main tellement oublié, dénié, prolongement de la droiture d’un bras relié au dos, nourrissant une épine dorsale qui fut un temps animale. La main, un conduit rempli de vent, naissant par la terre, reliée, stockée dans le ventre et servant, nourrissant nos actions. Dos de main, métacarpes que j’ai vu onduler chez un de mes amis danseur de Butoh. Dos de main nourrissant une paume charnue remplie d’une vision silencieuse. Dos de la main, nature paisible, pudique, c’est un noble mâle rempli de soleil.
Le toucher se fera en doigt et en paume. Délicatesse affectueuse et maternelle, intuitive est sa nature. En conduit d’un vent invisible, chaque bout de doigt est une goutte, une aiguille, une petite flamme. Ainsi la main, perce et traverse, caresse et effleure, excite, guérit, embrasse et aime. Oui la nature de la main est de toucher pour mieux aimer, de lâcher pour mieux offrir, de s’ouvrir pour mieux s’alléger.
Sur le tas calcareux, la coiffe emmêlée capte les lumières de l’astre du matin et les guide dans les profondeurs du rocher. Au pieds de la masse de pierre, quelques flaques claires rescapées de l’ombre verte, se sont déposées en reste de la clarté matinale. Au fil du jour, le clos restera dans l’ombre, préparant la nuit afin qu’au silence nocturne, des farandoles s’animent dans l’obscurité protectrice. Oh que ne suis-je admis encore à ces danses occultes ? Me faut-il mourir pour y accéder ? Les doutes me mettent dans cet équilibre illusoire qui sépare.
L’ablution ravive le bleu et l’offrande embellit la prosternation.
Je me sens plus propre, plus brave, dans les instants qui suivent ces petits gestes simples où je me donne avec innocence et confiance. Je décèle l’être enfoui tout vibrant d’une clarté invisible et rassurée, je me retire, rempli de courage et de patience.
La grande nature, toute dans ses majestueuses splendeurs, dissimule une sève clandestine. La perception est comme dans un grand amour, l’instant se réinvente continuellement. Ici pour toucher à ce réel, nulle habitude n’est tolérée. Cela jaillit au plus profond d’un magma imaginatif, d’une vigilance guerrière et instinctive, dans une impossibilité toute réelle à penser. Cela se faufile du fond du grand fond, émerge dans une auguste brume, prenant forme, un visage, un aspect, une couleur, des mots.
Plus je contemple cette masse endimanchée de sauvage et de branches feuillues, plus je la sens me considérer, m’examiner, parfois ébahie. Le minéral bleuté, enlacé de la lumière du Laurier estime ma présence d’une sensation éminemment intelligente, douce, une lucidité un subtil pénétrant devant lequel je peux juste me tenir, être là, sans demande et sans quête. Je deviens, je suis l’offrande à l’offrande. Quelques pétillements légers, tels de fines bulles claires, remontent de ma poitrine, de mon ventre, de mes mains. Je goutte ce breuvage dans une coupe sans forme.
Chaque bulle est une flamme éclairant une mémoire nouvelle, une révélation d’un autre temps et ce n’est point les souvenances trop liées à un passé rempli de douleurs, excusant un présent trop pauvre car engoncé dans une anamnèse stérile. Chaque bulle est un flocon éclatant et non né.
Une fois le bleu de la pierre dissipé dans l’étendu des nues, après que le roc soit devenu poussière de sable, puis que les feuilles et les bois flottent en parfum d’humus, subsistera ces empreintes lumineuses, fulgurantes autant qu’invisibles.
Yusen
Arrière
Dès lors qu’un homme rencontre le vent, il devient pirate ou brigand, mais de cette race aussi tendre qu’implacable, aussi fragile que pointue, aussi déraisonnable qu’avisée. Confronté aux extrêmes, il s’y risque, n’ayant plus le choix. Le goût de ce bon génie, brise attendrissante ou bourrasque maladroite, le porte inexorablement dans des contrées captivantes et inconnues.
Enfant niais, l’hérétique d’un temps se nourrit de nature, d’intelligence et de mystères.
Ses rencontres prennent un goût inédit et ce qu’il exécrait autrefois, s’annonce par des couleurs étincelantes et attachantes.
Dans ce début d’ après midi de juillet, la touffeur d’un ciel déjà blanc légèrement bleuté, descendait doucement des hauteurs sans encore envahir les ombres gardiennes des magies.
Je m’assoie pudiquement sous la masse des charmantes petites feuilles triangulaires. Quatre troncs massifs, imposants se sont réunis dans une étreinte qui semble d’un autre temps. Les ramures voisines, se mélangent et les feuilles plus sombres, vernissées font ressortir celles des érables. Ces deux seigneurs siègent fraternels, complices et intimes.
Je côtoie ce lieu régulièrement, mais d’habitude de l’autre côté, du bas là où la roche bleutée m’accapare. Sur cette hauteur, ce derrière, empreint d’une féminité que j’ai ignorée, réside un monde plus tendre, plus intime. En bas, la grande pierre désormais toute solaire trône sous un laurier impérial, lui aussi émissaire de lumière. Quelques-uns viennent, semblant s’y recueillir un très court instant et un rocher compréhensif sourit de la frivole intention.
Là, dans cet arrière, sans le mot, je demeurai...
L’ombre semble délicate et précieuse. Cette asile englobe un rien, un inutile de grâce. Je m’y suis coulé, abandonné, réfugié...
Une immense tranquillité parfume l’ espace, aucun centre, aucune périphérie, tout y est complet, banal, neutre, ardemment objectif.
Un trait de lumière se glisse, là ou là comme le doigt d’une main secrète caressant l’invisible. Un tressaillement soudain passe, agite quelques feuilles, faisant l’effet du tremblement d’une paupière sans oeil. Puis la saillie soudaine disparait, s’évapore. Seule sa trace dans ma chair vibre encore quelques brefs instants.
De temps à autre un oiseau plonge dans le feuillage, disparait, familier du lieu, il observe ma présence incongrue sans que un seul instant je puisse deviner où il peut être. Je tente de faire disparaître tout ce qui agite mes sensations, mes pensées, voyant bien vite que c’est là dans cette tentative présomptueuse, réussie, aboutie ou pas, que réside ma séparation. Je ne peux voler et oiseau devenir, je ne peux bois d’arbre me tenir, mais je peux laisser faire, abolir à tout jamais le contrôle arrogant.
Je me tins ainsi, observer sans rien débusquer, sentir sans rien appréhender. L’instant devint d’une grande douceur et je me retrouvai debout sans avoir à me lever, comme un mouvement issu d’une vague indéfinissable.
Yusen
MISOGI*
Dans la grande ronde de nos disciplines, nos émotions, nos sensations, nos envies, nos idées, notre engagement fluctue inévitablement.
Des moments enthousiastes aux questionnements sans réponses, dans les certitudes et les doutes, par les convictions et les rengaines collectives nous voguons ainsi dans notre pratique.
L’esprit vaque ainsi car c’est son penchant et sa nature de vide attire le remplissage.
Là pourrait apparaître chez le pratiquant une introspection salutaire qui pour la plupart d’entre nous est impossible à entamer. Mais ce n’est point de ce propos dont je voudrais éveiller l’attention.
De nombreux débutants se donnent, s’investissent et poursuivent une quête incertaine et oscillante. Quelque chose les astreint, les détermine, objet bien inexplicable.
Ils tentent jour après jour d’en déchiffrer les causes, se regardant faire et ne sachant prendre appuie que sur un intellect extrêmement versatile.
Parfois la tentation de contrôler cette attirance prend trop de place et celles et ceux qui croient y arriver, quittent tôt ou tard afin de répéter une romance ailleurs. Le passage aura laissé une petite écharde parfois bénéfique, parfois douloureuse.
D’autres poursuivent avec courage malgré les embûches qui ne finiront pas d’augmenter.
La romance ayant payé son dû, surgit alors un essoufflement de la motivation qui va nous mettre à l’épreuve. Dans cette zone les choses cachées affleurent et les rôles tenus ne suffisent plus à masquer les attitudes perverties. Ce sera une nouvelle sphère qui en fera quitter de nouveau un certain nombre pour une autre ritournelle plus douce, plus permissive.
Si l’on passe ce cap, on touche alors une sorte de renouveau. L’authentique pratique est là pour nous révéler et entamer le « misogi ».
Il nous faudra une nouvelle romance, plus audacieuse, plus profonde, plus vraie … pour poursuivre.
La pratique décèle les barreaux de la cage qui nous abrite. Les dévoiler sera les premières avancées vers un Soi encore largement dissimulé. Il est probable que plus les barreaux sont solides et épais, plus le trésor intérieur est grand.
Yusen
*Misogi : purification
SHO RIN ZETAÏ *
Bien sur le jeu des prises de parole pour tenter de s’exprimer est bien ambigu. On s’y risque, la pression du groupe et du professeur étant non négligeable. Cela amène le plus souvent des mots trop entendus ou trop attendus.
Le mystère de l’arc est noyé dans le flot du discourt qui se veut sensible, attentionné, intelligent et sensé.
Ainsi les paroles sont tellement prévisibles.
Pourtant la profondeur de notre pratique est justement qu’il n’y a rien à sentir, rien à comprendre, rien à voir. Il suffit seulement de Faire, non point parvenir, juste faire, appliquer. Que l’on soit bancal ou incapable, habile ou astucieux, débutant ou ancien, peu importe car il s’agit de Faire chacun dans son possible. S’en acquitter à sa mesure du moment sera la tâche. Tout désir, tout écart, tout autre projet est justement l’entrave à Être.
C’est là, qu’y réside le tir.
Ainsi le Dire jaillit et la joie conviviale du tour de table s’acquitte de sa mission chaleureuse.
Anecdote :
je me souviens au vieux Dojo de ce vieux monsieur, pratiquant de longue date et proche du vieux maitre. Il pratiquait d’un manière humble et discrète. Quand il arrivait au Kaï, il tremblait étrangement puis il lâchait sa flèche dans un désordre incompréhensible. Il faisait quelques flèches toujours avec le déroulé à genoux. Je ne l’ai jamais vu atteindre sa cible. Mais tout néophyte que j’étais dans ce monde de l’arc, je ne pouvais pas échapper à cette ambiance qui l’entourait et qui m’émouvait très profondément. Je me suis dit que là, pouvait peu être résider l’essence de l’arc et la joie de tirer.
Une fois O Uchi Sensei disparu, Suzuki Sensei est devenu le maitre du Dojo. Il ne manquait pas d’inviter lors des Tai Kaï, ce noble monsieur a diriger le salut.
Yusen
* absolument regarder droit devant soi
Détresse
La détresse Inconfortable, insupportable.
Quand on voit avec ce regard implacable autant qu’aimant, impartial autant que loyal, apparaissent les détresses qui dévastent et submergent. Aussi, vivre c’est développer et être familier de cette façon d’observer sans les émotions de jugement, de comparaison et d’analyse.
Quitter le « moi je » qui déforme.
La plupart du temps, le désarroi s’incruste, on s’y habitue et la désolation inflige un dehors catastrophique. L’insupportable devient une manière de vivre, une manière d’être créant des mœurs, des attitudes, des coutumes, des croyances artificielles. On exclut ce que l’on ne veut pas regarder en nous. Appliqué à la société, cela bascule si facilement dans de la haine et la ségrégation…
Les conflits, les guerres sont issues de ces déséquilibres.
Pourtant l’Aikido, le Kyudo, Méditer, peut œuvrer à la reconquête de nos intérieurs trop abimés. Il s’agira de libérer cet espace, déblayer les obstacles inutiles et découvrir notre vraie nature spacieuse. D’autres voies bien heureusement respirent, mais celles-ci, je les fréquente et elles me nourrissent.
Cela étant je vous les fais partager.
Il m’arrive trop souvent de constater le choix désastreux de retourner dans les aises d’une vie facile et pauvre pour quitter celle de la pratique et de ses enseignements résolument inconfortables mais remplis de toutes leurs profondeurs éclairantes.
La Discipline est là pour que l’esprit de gagne disparaisse au profit de l’esprit de l’Etre. Mais désormais qui veut cela ?
La vie de nombreuses personnes s’est noyée dans une habitude de l’insupportable, les corps peinent dans leur dureté, le desséchement et l’insensibilité. Le monde du sentir, de l’invisible est figé et l’on ressasse continuellement. Alors celles et ceux qui tentent de voguer vers plus de lumière apparaissent comme des originaux, des énergumènes, voir des fâcheux.
Il semblerait que nous créons le monde qui nous entoure.
Je souhaiterai par ces quelques lignes, alerter vos réflexions sur les vagues qui animent la vie d’un pratiquant engagé.
Au début, il y a immanquablement une période romantique qui nous remplit. La pratique, l’immersion dans le groupe, rendent ce moment engageant, plaisant. Souvent cela correspond à nos idées et conforte le sentiment que nous avions raison. On apprend assez vite et le tir (Kyudo) les chutes et le marcher (Aikido) se mettent en place grossièrement. Après avoir résolu les première tendres difficultés de la prise de l’arc et d’un lâcher embrouillé (Kyudo) , la flèche vole vers le makiwara. Le bain exotique nous porte, on rêve de tirer à la cible et l’on s’interroge du fait qu’on n’y soit pas déjà… Tout cela est normal, se répétant en nuance pour chaque pratiquant. L’étude se déroule ainsi pendant quelques années dans ce climat quelque peu idéaliste où le mystère, de temps à autre, fait quelques apparitions dans les émotions. Quelques regards interdits trahissent le passage de l’ange, bien vite contrôlé, censuré, nié.
Parfois la flèche rejoint la cible et malgré l’avertissement qui tombe d’une manière implacable, on demeure convaincu de sa bonne réalisation. Tout cela est normal, habituel, commun.
Il me fut dit, il y a de cela bien longtemps que la pratique est romantique. Cela se confirmait dernièrement : la vision de la nature est un état de romance.
Il est vrai le romantisme ne fait pas parti des cultures orientales, mais n’ai je pas vu quelques fois mes professeurs verser une larme pudique devant un fait de la nature qui pourrait paraître anodin.
Cette réflexion toucha fortement la sensation poétique et mystérieuse des choses que j’appréhende. Chaque regard, chaque sensation, chaque contact, chaque bonjour, déborde de ma pensée, la submerge pour toucher au mystère.
Mes lignes depuis longtemps guettent ces mots qui sonnent et pourraient retentir d’un absolu cellulaire, un frissonnement brûlant.
Pourrais je m’y noyer un jour ?
Les premiers pas de notre corps débutant nous font appréhender cette innocence. Cette pureté qui nous habite probablement à la naissance et même avant. Elle est aussi dans l’arc qui s’ouvre et dont la flèche jaillit. Je constate et déplore que cette phase-instant dure si peu ou n’existe même plus, laissant la place aux élucubrations intelligentes, raisonnées, calculées et donc imbues.
La raison ne supporte plus rien d’autre qu’elle-même.
Le mal-être habite le monde, justement pour avoir quitté cette innocence. Un pressentiment saisit le chemin à prendre. Il sera long, extrêmement long et difficile.
Découvrir qu’il existe est la vraie victoire.
Nous allons alors quitter un inconfortable travesti de rôles, pour pénétrer un autre inconfort, parfois tonitruant. L’insupportable habituel n’est plus appréhendé, enfoui sous des épaisseurs de devoir et de charges.
La confrontation sera brulante, Elle durera des années. Elle bousculera toutes nos convictions, remplacée par un instinct affectueux. L’intuition romantique sera salutaire, la nature complice en soutien, en exemple. Revenir à cet état de débutant est bien plus qu’une histoire d’humilité, de modestie mais un sens vital essentiel.
Alors répéter les gestes devient un délice que l’on déguste. Ça bouge du dedans, la réussite est dans l’ouvrage et l’intention. La fantaisie apparait alors dans la rigueur de l’œuvre.
Yusen
Lecture après lecture je l’allégeai de mes formules trop cassantes, trop exigeantes et cela faisant j’entame ma démarche toute personnelle vers un peu plus de tranquillité.
Je vous le livre donc et faites à votre convenance.
« Plus je vieillis et plus je trouve qu’on ne peut vivre qu’avec les êtres qui vous libèrent et qui vous aiment d’une affection aussi légère à porter que forte à éprouver»
Pratiquantes et Pratiquants
Une fois n’est pas coutume, depuis les années 1982 où je partage la pratique de l’arc en tant que guide de cette magnifique discipline, je vais vous compter de cette émotion qui me submerge chaque fois que je tente de guider le groupe...
Une fois n’est pas coutume et permettez moi ces confidences et vous raconter cet état d’âme qui me traverse actuellement.
A propos de mes écritures
Il est des vents qui traversent le pratiquant que je suis et qui découlent de mes pratiques, J’ai tenté de les exprimer au travers de mes écrits, les mettant au service de ma relation à la nature, le ferment de notre activité.
On peut y deviner mes asphyxies devant le monde en perdition mais ces contemplations me nourrissent, me corrigent comme le ferait un maitre qui me fait défaut.
Je ne recueillis que très peu d’échos à ces pages à part quelques personnes hors groupe qui sont venus vers moi pour relater leurs impressions à la lecture de mes mots et m’encourager dans ce choix d’écriture de débutant.
Pourtant les perceptions ou les émotions partagées, voir les critiques me permettent ainsi d’améliorer cette griffe balbutiante et éventuellement de consolider, affiner et nourrir une relation d’étude qu’il peut y avoir entre nous.
Oui, écrire je le voudrais par des mots dont la musique et le sens éprouve le lecteur autant que l’écriveur. Oui je désire m’engloutir au cœur du verbe et de son chant, à l’image de l’archer qui s’enfonce avec courage dans les profondeurs de l’instant d’un lâché instantané.
Il est de coutume dans les enseignements que le guide taise ses doutes ou les questions qui le traversent sur la pratique.
Je déroge comme vous le voyez à cette règle et je m’en excuse.
Mais cette fois-ci, je voudrais y aller plus directement, plus promptement et partager un point essentiel à mes yeux de ce qu’il se passe en moi !
Cela pourrait être aussi un exemple, un risque...
A propos du partage
Il est dit :
« Il n’y a pas de pratiquant doué ou habile mais un état participant du degré d’éveil de chacun »
Cet état d’éveil semble manquer. La relation à la nature comme essentielle sensibilité de conscience est trop dictée par les loisirs stéréotypés. Tendre vers un état d’épanouissement, est aussi cette communication instinctive et sensible qui relie, nourrit, habite, gommant les éternelles attitudes égocentriques.
Actuellement, rien de cela ne transpire dans le corps des archers, ni dans leurs dires.
Bien sur, cette vague consternée, désolée, voir bouleversante, demeure un vaste sujet d’étude toute personnelle, intime et je ne manque pas de m’y atteler sachant pertinemment que tirer, est cet état «où nulle émotion ne vient perturber le lâcher».
Je me livre à mon ami Dominique qui est d’une belle écoute, à ma compagne qui rencontre les mêmes difficultés, sans que nous sachions vraiment comment faire. Cela étant dit, bien que navrés, nous gardons le feu sacré, ravivés par quelques rares personnes qui semblent plus ouvertes à mes jérémiades.
Mes maîtres ont disparu.
Il y a bien longtemps quand je partageais avec Suzuki Sensei mes interrogations sur le fait de guider un groupe et ses difficultés alors que j’étais tout débutant à ce qu’il m’arrivait, ce qu’il me tombait dessus, avoir l’immense responsabilité de faire découvrir la voie de l’arc, moi même ignorant son sens profond. Cela me troublait et risquait de me corrompre. Mais une intuition irrésistible guidait mes pas, chemin qui n’irait désormais nulle part ailleurs.
Un maitre, un jour rencontré me dit : « si tu cherches quelque chose enseignes le »
C’était tellement surprenant dans ce pays où le sens du maître a tellement d’importance pour un étudiant de la voie. Et comme tout précepte, cela peut nous faire divaguer hors du vrai chemin et peut aviver un égo déjà trop grand.
Ainsi, il m’a semblé suivre des pas déjà tracés. Cela étant, je décelais un peu d’arrogance de ma part devant cet emballement et redoublais d’allant à pratiquer. Ne voyant le maître qu’une fois par an, cela me semblait bien présomptueux mais là était mon chemin et il fallait que je m’en accommode ou que cela devienne un atout.
Le senseï me conseilla de couper les branches mortes qui pesaient sur un tronc trop fragile. Ce que je fis en arrêtant tous les stages que j’animais alors parcourant le territoire de l’est à l’ouest et du nord au sud. Je me consacrais alors presque essentiellement au Kyudojo et Aikidojo. Je diversifiai mes lectures, mes rencontres intuitives d’études qui pourraient servir la voie.
Je réfléchissais au fait de vouloir avoir des étudiants en nombre ou pas. Dans ce milieu, les professeurs que je rencontrais ici en France, n’étaient pas clairs sur ce point, tous désirant la célébrité et l’argent. Je m’éloignai alors de ce monde. Néanmoins, cela devint la manière de « gagner ma vie ». Gagner sa vie, je le découvrirai un peu plus tard, est d’une autre dimension. .
L’argent n’étant qu’une banale conséquence et qu’il ne pouvait être en aucun cas une affaire, alors rien ne changerait au chemin emprunté. OUI saisir les mots trop rares du maître, s’en emplir et les appliquer inconditionnellement. C’est la voie.
Partager fait partie de cette conduite. Parler régulièrement, se confier est aussi le sentier de l’arc.. Bien sûr mon tempérament souvent impétueux, mon niveau d’expérience très modeste, n’engage peut-être pas à se découvrir et à poser question, à ouvrir son coeur.
Pourtant sans demande, la pratique n’existe pas.
A propos de la pratique
La première page de notre site exprime l’état dans lequel le pratiquant se présente au Dojo et devant la cible.
Je ne vois plus du tout cette conduite innocente du pratiquant qui lui permet de démarrer la pratique.
OUI démarrer l’étude commence par cette acceptation. Elle est mystérieuse. Alors on ne se préoccupe pas de l’énigme mais on peut deviner que le remède est dans le « faire » contenu dans la Voie.
Pour rentrer dans ce mystère il faudra se donner, prendre ce risque ignoré. Accepter d’être chamboulé !
Plus personne ne semble intéressé par : QUI, IL pourrait être, tirant à l’arc. Plus personne ne semble souhaiter une transformation et quitter la médiocrité.
Plus personne n’observe l’invisible. Là encore ce n’est point l’indiscernable qui prime mais le « guetter »... la vigilance.
La quête du trou dans la cible s’affirmerait comme le seul programme abordable...
Les remarques même légères déclenchent des vexations, des bouderies et même parfois des pleurs.
J’ai souvent sangloté mais une seule fois devant les mots fracassants du maître. Les autres fois, suite à un entrainement intense, cette émotion jaillissait sans que j’en discerne l’origine.
Il semble impossible de sortir ou de vouloir sortir de la raison (tirer sur la corde.)
Il semble impossible de vouloir un bras gauche qui ouvre.
Il semble impossible d’écouter et de se maintenir à l’écoute.
Il semble impossible d’appliquer et se maintenir dans l’application.
Il semble impossible de regarder sans analyser sans penser, sans comparer. Il semble impossible de vouloir s’ouvrir.
Confessions
Au fil des années, les corps des pratiquants de longue date, vieillissent, quoi de plus normal et tellement intéressant. Les maux, les habitudes se révèlent pouvant être de lourdes charges pouvant révéler un nouveau chemin de conscience dans la paix de l’ acceptation. Le peu de forces acquises par les années de pratiques servent un égo étroit où l’ouverture de coeur s’amenuise. Pourtant si nos capacités physiques indéniablement baissent, cela serait au profit de plus de relâchement, d’ouverture, d’empathie, d’un coeur aimable, d’une brillance, même si les traits ne parviennent plus dans la cible.
La quête du « sans Rien » de cette conscience éclairée dont on ignore tout, demeure pour nous tous probablement un étrange domaine, une brume vague et lumineuse se tenant pourtant tout près dans notre vraie nature.
Par contre la vigilance, la noble attention fera de notre vie une embardée joyeuse et un peu d’humanité donnera à ce lieu et à notre monde la bouffée d’air qu’il lui fait profondément défaut.
Chaque petite chose qui anime notre corps, nos émotions, nos pensées, vibre avec des conséquences inimaginables, inconcevables. Pratiquer c’est laisser venir à soi, anoblir, trouver les antidotes, laisser se transformer, rendre la beauté, c’est « Kyu Do » et « Yumi no Michi. »
Guider, voire enseigner ne se résume pas à dire ce qu’il faut faire, mais c’est se donner tel un vent tourbillonnant dans le corps et le coeur du tireur. Pratiquer, c’est appliquer à soi même les vertus que prodigue l’arc.
La paix en est l’enfant.
Yusen
“ L’art de vivre consiste à garder intact le sentiment de la vie et à ne jamais déserter le point d’émerveillement et de sidération qui seul permet à l’âme de voir ”
Christian Bobin
« difficile » n’est qu’une raison, un produit collectif d’un mental trop limité.
Il n’est que la cause d’un désir d’aboutissement que l’on voudrait programmé.
Il est une injure à une évolution globale et inéluctable. Ce mouvement sans retour
glisse en spirale, c’est la vie qui ne se soucie point du temps.
Notre terrain est non seulement propice à cette histoire mais conçu pour Elle.
Comme une terre pouvant accueillir une jeune pousse qui s’épanouirait dans un
dédale végétal non par chance ou par hasard, mais dans une sorte d’intuition
globale et impensable.
La graine aspire sa pousse.
Pratiquer c’est CELA. Pratiquer c’est Vivre. Vivre est la liberté d’évoluer dans un
tout, par un tout, pour le tout. Participer à sa propre évolution et son propre
aboutissement inconnu, inconcevable, inimaginable.
Chaque être sensible à nos côtés vogue dans cette spirale, chacun conduisant et
soutenant l’autre. Toute attitude personnelle nie le grand tout, la grande onde, la
magnifique ronde.
Permettre par la pratique juste des Kihons c’est enrayer la dégradation de nos
énergies vitales dans nos organes autant que dans notre cœur. Ainsi notre
évolution participe et contribue à celle de l’univers dont chacun de nous est un
grain flamboyant, et cela bien avant d’avant.
Elle est tournoiement, ardeur, audace, poigne, cela générée par le maître d’œuvre.
Rien n’est autoritaire ni despotisme.
* C’est un feu qui génère les lois de la pratique.
* C’est une vague bleue qui lave et parfois noie.
* C’est un vent qui renverse les choses trop établies.
La pratique œuvre a transformer quelque chose en nous bien au delà de ce qu’il est possible d’imaginer et presque à notre insu.
Loi des vertus du Féminin, du Masculin dans l’équilibre des fleurs, de l’arc, de l’union Aiki.
L’inconfortable de ne point réussir est la clé de la joie à étudier et à répéter.
Cette intuition, cette attirance guidera notre motivation. Sans cela la répétition de nos gestes sera une peine trop importante pour un égo illusoire. L’échec devient duperie, la réprimande génère aveuglement plutôt que hardiesse et lucidité.
yusen
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